3.4.16

Les véritables maîtres n'ont pas besoin de ceinture en couleur ni de titres ronflants

Lorsque j'ai repris l'aïkido en 1981, mon professeur (FFLAB) avait un profil à l'opposé de celui que l'on rencontre le plus souvent aujourd'hui. Il ne m'a enseigné "que" pendant 1 an et n'était "que" 1er dan. Pourtant il est resté l'un des plus compétents que j'ai jamais croisé, de par sa modestie, ses analyses, sa philosophie liée à l'aïkido, sa culture orientale, son niveau technique.

S'il enseignait encore aujourd'hui il est vraisemblable qu'il aurait peu d'élèves car sa rigueur et sa fidélité à l'esprit du fondateur de l'aïkido seraient en décalage total avec ce que les pratiquants acceptent aujourd'hui de donner pour progresser réellement.
Il aimait à dire que même s'il ne lui restait qu'un seul élève fidèle à son enseignement il serait satisfait.

Dans les années 80, il n'était pas rare qu'il soit choisi comme aïte par les grands maîtres lors de leurs passages en France (par exemple Me Sugano).
On était bien loin de la course aux scores et aux rivalités, partout omniprésents dans les comportements et les discours, surtout dans certaines écoles revendiquant le label "traditionnel". 
Ce professeur (qui ne s'est jamais fait appelé "maître") avait pourtant un niveau sortant du lot et ça me fait bien marrer de voir les titres ronflant que beaucoup de petits profs s'attribuent ou se voient attribuer histoire de ne pas les voir se barrer ailleurs.

Dans le même esprit, j'ai fait la connaissance d'un authentique professeur qui lui aussi enseigne quasiment gratuitement (à Montluçon).
N'ayant rien fait pour se faire connaître "par des moyens modernes", il a enseigné pendant plusieurs années à une petite poignée d'élèves, malgré qu'il ait à sa disposition plus de 200 m2 de tatamis.
Bien que nos approches soient différentes, nos échanges ont été enrichissants.
De filière Hikitsuchi/Blaise et diplômé Aïkikaï, il a néanmoins su se détacher de l'emprise de sa fédération afin de pratiquer sans contrainte et être libre de conduire ses propres recherches.
Peu d'aïkidokas ont les couilles pour le faire et cela mérite d'être salué.

A aucun moment ni l'un ni l'autre n'avons eu l'idée de comparer.
Bien au contraire nous avons travaillé à améliorer nos points communs et à tirer meilleur profit de nos connaissances respectives.
On est donc bien loin des attitudes sectaires et des tentatives de formatages que l'on rencontre aussi bien dans les structures dites "traditionnelles" que dans les fédérations.
 

2.4.16

Arrogance, ego, prosélytisme sont à l'opposé de la philosophie de l'aïkido. Et pourtant...

Contrairement à ce que certains mauvais deshis (de mon maître d'aïkido) me préconisaient de faire, pratiquer le prosélytisme à outrance est signe d'une arrogance totalement déplacée dans notre art martial.
A t on jamais entendu un authentique maître vanter sa discipline ou son propre travail ?
Celui qui possède une grande maîtrise se doit de ne montrer ni ses forces ni ses faiblesses...

Au lieu de se comparer à tel autre club, organisation ou structure, personnage, etc., il vaut bien mieux tracer sa route et laisser faire le bouche oreille.
Par contre, il n'est pas interdit de décrire ce qui nous différencie des autres approches et concepts, indiquer nos méthodes et expliquer nos choix.

Malheureusement avec le recul, on constate qu'il n'est pas rare que des gens peu scrupuleux s'emparent de nos descriptions, usurpent nos arguments sans les comprendre afin d'en faire des slogans de vente.

Le monde étant ainsi fait il est donc préférable de ne rien divulguer, sauf à ceux qui font l'effort de pénétrer dans notre dojo.

En aïkido, l'esprit de compétition n'est pas sensé exister puisqu'on doit faire abstraction de notre ego.
Se comparer aux autres en prétendant être les meilleurs trahit immédiatement un profil égocentrique qui n'a pas sa place dans notre discipline.
Ceux qui se comportent ainsi ne sont pas de véritables aïkidokas.
Ils profitent d'un apprentissage technique, trahissent l'esprit du fondateur de l'aïkido et ne sauront jamais maîtriser cet art.
Pourtant, en aïkido dit "traditionnel", nombre de petits professeurs de quartier se qualifiant de "maîtres" n'hésitent pas à dénigrer ce que d'autres font et prétendent détenir seuls la science.
Ils abusent les consommateurs-clients-pratiquants, mais après tout c'est tant pis pour eux puisqu'ils sont assez bêtes pour croire en les licornes.
Ces petits professeurs utilisent le terme pompeux de "maître" pour signifier qu'ils sont patrons de leur dojo (le mot club serait plus approprié pour la plupart), alors que le publique fait le parallèle avec "maîtrise de la discipline" ce qui est qu'exceptionnellement le cas.
C'est ce qui s'appelle jouer avec les mots afin d'abuser les gogos.
 
Cette duperie est d'ailleurs entretenue par le haut de la pyramide, flatter les egos étant un outil pour booster les troupes et développer le commerce.
Et comme disait M. Coué, à force de s'entendre dire et répéter qu'on est bon on finit par le croire soit même. Et oui "chers maîtres" !
Dans les approches dites "traditionnelles" on trouve donc de tout : de l'excellent, du bon, du passable mais aussi souvent, du pire.
 
 
 

Petits faux maîtres de quartier

Le ton arrogant employé pour annoncer les stages d'aïkido "traditionnel" est extrêmement contre productif. Il renforce la caractère sectaire qui avec le recul, est incontestable.
Le slogan, bien loin d'attirer, constitue un repoussoir pour les pratiquants épris de liberté y compris ceux qui sont inscrits dans des clubs reliés à des fédérations, souvent par le fait du hasard.
On peut croire au concept du yin et du yang sans pour autant devoir nier que rien dans l'environnement humain n'est jamais où tout noir ou tout blanc mais la plupart du temps constitué de gris colorés.
Celui qui croit détenir LA vérité en quelque domaine que ce soit se prend pour dieu et cesse immédiatement de progresser.
Il ne suffit pas de prôner être capable de se remettre en question, encore faut il savoir le faire soi-même. Cela implique un minimum d'humilité, qualité devenue particulièrement rare y compris et surtout de la part de prétendus "petits maîtres de quartier".  
Quand un discourt se situe aux antipodes des faits réels, le message se trouve totalement discrédité. Même si l'approche "traditionnelle" demeure la plus cohérente, les nombreuses dérives ont fini par empoisonner le travail et les recherches du pratiquant lambda, qui a mille fois mieux à faire que se prendre la tête avec les polémiques.

Ces dernières années, ce type de comportement (arrogant voir agressif à l'égard d'autres approches) s'est insinué chez beaucoup de pratiquants, souvent même à leur détriment.

C'est ce que l'on appelle la manipulation mentale.
Les meilleurs manipulateurs font en sorte que leurs auditoires ne pensent plus par eux-mêmes, sans que ces derniers s'en rendent compte le moins du monde.
Et quand bien même certains pratiquants sortant du lot sont conscients de cette emprise le système "hors fédé" les rendant dépendants, ceux-ci sont contraints de ne pas moufter s'ils veulent continuer de bénéficier d'un enseignement "traditionnel", et de qualité.
Il faut donc accepter en permanence le deal, jusqu'au point de rupture qui peut intervenir à tout moment.