19.1.17

Interdits et privilèges

Beaucoup de gens ont la vocation de l'encadrement et de la transmission de leur savoir.
Ils en font pour certains leur métier et cela constitue leur gagne pain, d'autres le font par plaisir et gratuitement, notamment au travers d'associations.
Je fais partie de cette dernière catégorie, n'ayant jamais cherché à monnayer mon goût pour la transmission, y compris dans le cadre professionnel où nombres d'employés que je ne connaissais même pas postulaient pour une formation par mes soins du fait de ma seule réputation par bouche à oreilles.
Il existe une 3e catégorie, ceux qui enseignent et transmettent dans des entités associatives tout en se faisant rémunérer leurs prestations, ce qui n'est pas interdit non plus.
Bien que n'étant pas considéré comme un sport (pas de compétition) l'état impose à l'aïkido les mêmes règles en ce qui concerne les diplômes autorisant la rémunération, à savoir l'obligation de détenir un diplôme dit "d'état".
Cette ineptie spécifique à la France donne aux détenteurs de ce papier délivré exclusivement au travers les fédérations, le privilège de pouvoir se faire rémunérer alors que tout autre pratiquant quelque soit son niveau de maîtrise, en a l'interdiction légale.
Cette situation ne profite pas seulement aux membres des fédérations.
Nombre d'enseignants ayant abandonné leur fédération pour rejoindre toute autre structure non fédérée, jouit du même privilège ad vitam aeternam.
Cette autre "anomalie" fait apparaître des situations très cocasses dans les structures qui ne sont pas reliées d'une manière ou d'une autre à une fédération.
Il est souvent mis en avant qu'une organisation d'aïkido n'a nul intérêt à se voir chapeauter par une fédération et qu'au contraire cela notamment lui confère toute liberté de mouvement et de distribution des grades, et que son fonctionnement n'a dès lors de comptes à rendre à personne, excepté à celui qui est présenté comme "le maître", celui qui se trouve en haut de la pyramide.
Il se trouve que ces maître des maîtres (les prof) peuvent être, en sus de leurs prérogatives liées à leur titre, détenteurs du fameux sésame autorisant la rétribution, ce qui est le cas dans 95 % des cas.
Or c'est bien connu moins il y a de convives, plus les parts d'un gâteau sont généreuses.
Comme il y a peu ou quasiment pas de pratiquants (et prof) ayant transité par une fédération avant d'atterrir dans une organisation non fédérée, il est facile de comprendre pourquoi certains tiennent absolument à ce que leur "école" ne soit jamais rattachée à une fédération reconnue par L’État.
Cette situation confère à quelques petits malins évoluant dans ces organisations le privilège de pouvoir être rémunérés alors que tous les autres ne pourront que se borner à faire "leur boulot d'enseignant" gratuitement (tout en œuvrant aussi pour "le patron" qui lui, est rémunéré).
Pire, étant donné qu'on martèle sans cesse à ces derniers qu'il leur est interdit de lorgner vers les fédérations sous peine de bannissement, ils ne pourront jamais faire reconnaître leur compétence de professeur malgré que la loi le leur permette aujourd'hui par équivalence de temps (les fédés sont seules habilitées à valider les diplômes d'état).
En instaurant des règles prétendument liées à une tradition (qui en réalité n'existent pas en ce domaine), les dirigeants d'organisations hors fédérations ne visent qu'à masquer un fonctionnement anti démocratique à la limite de la légalité et ne profitant financièrement qu'à quelques discrets privilégiés.
On observe ainsi que de nombreux enseignants exerçant depuis de nombreuses années et ayant pour certains (es) formé des centaines de pratiquants n'ont jamais perçu le moindre centime au titre de leurs compétences. Par contre ils ont participé à entretenir et développer le système qui profite essentiellement à celui (ou celle) qui se trouve en haut de la pyramide, ainsi qu'à quelques uns faisant partie du sérail si tant est qu'ils soient détenteurs d'un diplôme officiel.